18 juillet 2006

Seb en Croatie








Kostajnica et nous…

Le paysage défile, inlassablement. Le soleil brule la peau à travers les vitres du bus. J’ai du mal à rester éveillé mais le panneau signalant l’entrée du village me tire de mon pseudo-sommeil. Ca fait un moment que j’attends ça. Un moment que j’attends l’arrivée à Kostajnica. Peut-être est-ce l’effet conséquent de 25 heures de bus pour parvenir jusqu’à destination… C’est surtout l’impatience de vivre enfin un chantier international, après en avoir entendu parler à peu près un million de fois sans jamais avoir tenté l’expérience…

Je découvre l’endroit où, avec dix autres volontaires, je vais passer deux semaines de mon existence. Notre logement a été retapé par les volontaires du précédent camp. Les volontaires arrivent. Deux français, une française, une belge, une danoise, une koréenne, un hongrois, un allemand, deux espagnols et moi.
Dormir à même le sol, une seule douche, glaciale, pas de four ni de frigo, mais qu'importe, on se
débrouille.

Kostajnica, ça se trouve en croatie, à la frontière Bosniaque. Une rivière, l'Una, sépare les deux pays, et ça et là, il reste des ruines, des maisons effondrées témoignant des conflits ayant ravagé la région. La guerre n'est pas si loin. Le pont qui relie les 2 pays n'a ouvert que l'année passée. C'est a dire que les enfants qui ont grandi pendant la guerre, et les jeunes qui ont aujourd'hui 17 ans, ne connaissaient pas un pays qui est à 500 mètres de chez eux…

Nous commençons le camp par des travaux de peinture dans notre logement. Faire de l’endroit un lieu de vie agréable… Idée artistiques et simples coups de pinceaux transforment les murs en fresques… Ca prend forme, ce n’est qu’un début. Nous poursuivons avec des travaux de déboisement sur une île au milieu de l’Una. Le physique nourri le mental. Entre deux après midi de déboisement sur l'île, une nuit de campement. Belle étoile et crépitement des flammes, guitare, paroles, de quoi rêver, le sommeil bercé par le chant des grenouilles...

Le groupe se soude un peu plus. On commence à se raconter, à se livrer, à apprivoiser et se laisser apprivoiser. On danse Espagnol, on écrit Coréen, et finalement, on chante dans la rue nos langues natives en une même chanson. « Voyager »… notre contribution au festival de rue. Bon. Par manque d’information, peu de monde est venu nous voir, mais tant pis. Et maintenant ? Une mamie à sa fenêtre. Elle souris. Sans hésiter nous nous plantons là, juste dessous, et reprenons notre chant multiculturel. La mamie semble ravie. On aura au moins fait une heureuse. On espère seulement qu’elle n’était pas sourde…

En fait, le travail n’a jamais été l’intérêt de ce camp. L’intérêt était autre. Vie ensemble pendant deux semaines, échanges au sein du groupe, complicité, coups de gueules, coups de coeur... finalement le sentiment d'avoir fait quelque chose ensemble, d'avoir partagé quelque chose de fort.
La raison de notre présence est le renouveau. Kostajnica renait. Nous participons à cette renaissance. Le seul fait de notre présence ici signifie que Kostajnica n’est pas seule. Il y a toujours quelqu’un pour partager un renouveau. Echanges avec les jeunes de la commune, simples bonjours amicaux, quelques mots échangés ça et là, apparemment simples mais lourds d’importance pour le coeur et l’esprit, je pense. Kostajnica et ses enfants, Kostajnica et sa vie, Kostajnica et sa mémoire… peu à peu, je m’attache à cet endroit.
Je me dis que les différences sont faites pour être partagées, je me dis que le voyage sert à partager les différences. Je me dis que ce sont les formidables expériences qui rendent les gens formidables. J'ai aimé Kostajnica, j'y reviendrais je crois…

Je relis une fois de plus ces lignes, issues du journal que j’ai tenu durant le séjour. Je m’imagine encore assis sur les bancs du camp, écrasé par la chaleur du soleil, ou bien sur l’île défrichée, chantant avec les autres au coin du feu, avec des sourires complices une bière à la main… Jivieli ! A la tienne ! A la nôtre ! A la santé de Kostajnica !
Je relis ces lignes et imagine, mais je suis en Belgique, assis devant mon pc. Mes yeux papillonnent Je viens de survivre à 25 heures de bus. J'ai mal partout. J'ai traversé la Slovénie, l'Autriche, l'Allemagne, la moitié de la Croatie... Ca fait du chemin, mine de rien.

Je suis de retour, mais je connais maintenant la valeur des chantiers. J’ai attrapé le virus. Je pense que ça ne s’arrête jamais, je pense qu’on ne peut en guérir… et que c’est bien comme ça ! !



Seb.

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